Résumé
Plutôt qu'une histoire des bibliothèques
espagnoles à l'âge classique, le lecteur trouvera ici une
analyse des représentations dont elles furent alors l'objet. Loin
de mettre les realia historiques à distance, cette étude
croisant de multiples sources « secondaires » jamais confrontées
auparavant (testaments, discours descriptifs ou panégyriques, programmes
iconographiques, traités sur la bibliothèque idéale,
ou encore bibliothèques de fiction) fonde l'éclairage thématique
des imaginaires sur l'examen attentif des contextes successifs qui les
sous-tendent. La période choisie est suffisamment longue pour permettre
de reconstituer l'évolution d'un système sui generis, où
s'inscrit non seulement une relation au savoir mais encore à la
mémoire et au pouvoir.
Au sein d'un corpus comprenant une trentaine
de figures, trois champs principaux délimitent cette progression
: les projets de Bibliothèque royale et la réalisation ambiguë
de l'Escurial, sous le règne de Philippe II; les idéaux des
Réformateurs catholiques dans les premières décennies
du XVIIe siècle; enfin, à l'époque de Charles II,
la quête d'un nouveau type de bibliothèque - plus exactement
de son double : la bibliographie. A ces discours savants, fréquemment
rédigés en latin, se superposent les imaginaires foisonnants
qui habitent le Quichotte ou le Criticón.
Cette archéologie qui nous conduit au
travers d'un contexte hispanique le plus souvent hostile au livre révèle
que les pesanteurs idéologiques n'étouffèrent pas,
tant s'en faut, la réflexion : vecteur d'ingénieuses tentatives
visant à synthétiser héritage humaniste européen
et culture contre-réformiste, la bibliothèque demeura tout
au long du Siècle d'or, par les espoirs et fantasmes qu'elle suscita,
au coeur des préoccupations de générations d'esprits
dont le destin collectif est ici retracé.
Mots-clés : Antonio (Nicolás)
- bibliothèque - Cervantes (Miguel de) -Clément (Claude)
- Contre-Réforme - Escurial - Gracián (Baltasar) - humanisme
- imaginaire - Siècle d'Or -.
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